Un parcours stupéfiant

Date : 19 Décembre 2012
| Chroniqueur.es : Aline Cloutier
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Brigitte et Emmanuel sont tous deux nés au Congo. Leurs destins se sont croisés en 1988 et c’est maintenant à Omerville que leur vie se poursuit avec leurs quatre enfants, devenus grands.

Le cheminement académique d’Emmanuel est spectaculaire. En 1978, il obtient un premier diplôme d’études secondaires en biologie-chimie puis, en 1983, une licence en sciences naturelles, option botanique, à l’Université de Yaoundé au Cameroun. Ensuite, il décroche une maîtrise en biochimie à l’Université de Rennes en France et, en 1988, un diplôme de 3e cycle en alimentation et nutrition de la Sorbonne à Paris. Emmanuel rentre alors au Congo où il fait la connaissance de Brigitte. Un mois plus tard, il quitte le Congo pour s’installer au Rwanda, où il occupera le poste de conseiller en développement à l’étranger pour une ONG suisse.

Pendant cette période, soit de 1988 à 1990, Brigitte s’active et travaille pour une société import/export au Congo. Elle retrouvera Emmanuel en 1990, où ils s’uniront officiellement à Kinshasa, puis s’installeront à Kigali, au Rwanda. Mais c’est à Goma, au Congo, qu’un an plus tard le petit Loïc naîtra. Le couple et le nouveau-né demeureront à Gisenyi (Rwanda) jusqu’en 1992, alors qu’Emmanuel sera muté à Kinshasa jusqu’en 1999. Trois autres enfants viendront agrandir la famille (Matt en 1993, Jacqueline en 1994 et Victoire en 1997).

La route se poursuit… jusqu’à Sherbrooke

Toute cette belle famille plie bagage en 1999 pour élire domicile au Cameroun jusqu’en 2007. Emmanuel poursuit son travail au Cameroun. Brigitte besogne toujours; elle crée deux petites entreprises : l’une est spécialisée dans la transformation d’aliments; la deuxième dans la transformation de fruits en jus, lesquels sont vendus au Cameroun. Son sens de l’organisation, jumelé à sa polyvalence, explique le succès de ces entreprises. Outre cette expérience, Brigitte enseigne à des enfants à l’école du dimanche dans une Église de Douala.

C’est en 2003 que les parents envisagent d’immigrer au Canada. Leur avenir professionnel leur semble plafonner un peu. Le couple a déjà des amis qui se sont installés au Québec et les connaissances qu’Emmanuel a acquises sur le Canada dans le cadre de son travail le motivent à vouloir y immigrer. Les démarches seront longues, mais leur choix se concrétisera en 2007.

Ils sont tous là fébriles — Brigitte, Emmanuel et leurs quatre enfants, Loïc (16 ans), Matt (14 ans) Jacqueline (13 ans), et Victoire (10 ans) — en attente de cette Québécoise prénommée Louise, mariée à un Congolais, qui doit les accueillir. Elle leur réserve une hospitalité des plus chaleureuses. La destination envisagée était Sherbrooke, mais leur nouvel ange gardien leur fait une proposition alléchante. Elle a un chalet à Orford dans la même région, et leur suggère de s’y installer le temps d’entreprendre toutes les démarches d’un nouvel arrivant. Ils acceptent cette chance inouïe.

La recherche d’un emploi

Dès le lendemain, Louise les amène au Ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles pour leur faire connaître les ressources mises à leur disposition : CLE (Centre local d’emploi), SATI (Service d’accès au travail pour personnes immigrantes), etc. Les enfants sont inscrits à l’école à Magog et, la semaine suivante, ils sont déjà sur les bancs d’école. Un mois s’est à peine écoulé, et Brigitte se trouve un travail comme plongeuse dans une auberge à Orford, puis quelques mois plus tard, elle se joint au Centre de récupération domestique du Québec à titre de trieuse d’habits et de matériel destinés à des pays africains. Après un certain temps, Brigitte rencontre un représentant du Centre d’orientation professionnelle, où elle recevra une formation en employabilité.

Comme Brigitte a déjà enseigné aux enfants au Cameroun, une idée fait son chemin : pourquoi ne pas ouvrir une garderie? En 2010, elle présente sa demande aux autorités concernées et en moins de douze mois, son projet se réalise. Aujourd’hui, elle prend soin de six enfants de dix-huit mois à cinq ans. Pour sa part, Emmanuel se trouve un premier travail en entretien ménager. En 2008, ses démarches lui méritent un poste de chargé de projet pour l’organisme de développement et d’éducation Actions Interculturelles.

Les enfants devenus grands

Loïc est à la maison lors de l’entrevue et sa mère l’invite à relater sa propre expérience. Un beau et grand gaillard de vingt ans s’amène, avec beaucoup d’aplomb pour son âge. La difficulté des premières semaines à se mêler aux autres étudiants et le sentiment d’avoir été plongé dans un environnement inconnu ont été pour lui de courte durée. Il s’intègre rapidement, de même que le reste de la famille.

Des manifestations racistes? Loïc affirme qu’il s’agissait d’incidents mineurs et rares. La vie à Magog plaît à toute la famille. C’est une ville à échelle humaine. Loïc vient d’entreprendre des études à l’Université Laval en économie et politique. Jacqueline et Matt poursuivent leurs études au Cégep alors que Victoire, la plus jeune, étudie au niveau secondaire.

Et l’avenir? « Notre avenir est entre les mains de Dieu. Nous allons travailler et nos enfants doivent étudier très fort pour récolter de bons fruits et contribuer à la richesse collective. Quand on arrive au Québec, il faut dans un premier temps faire le deuil de ce que l’on a été dans son pays d’origine, c’est-à-dire ne pas hésiter à prendre un emploi en-deçà de ses capacités et compétences, être patient et s’ouvrir aux autres, notamment par la participation à des activités de bénévolat », de préciser Emmanuel.

La famille goûte les petits bonheurs de sa nouvelle vie, bien installée dans sa chaleureuse maison d’Omerville. Et gageons que d’ici la prochaine décennie, ces Québécois d’adoption poursuivront tous une belle carrière au Québec et continueront de s’épanouir.

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