Le meilleur reportage vaut-il la mort d’un journaliste?
C’est la question que pose Danielle Laurin tout au long de Promets-moi que tu reviendras vivant. Dans ce livre, elle s’adresse directement à son conjoint, reporter de guerre. Elle l’interpelle, le questionne. Elle alimente sa réflexion grâce à des entrevues réalisées avec 18 autres journalistes qui pratiquent le même métier que son mari. C’est lui qu’elle cherche à comprendre à travers eux, ce qui le pousse à choisir encore et encore de risquer sa vie.
Une approche intimiste, donc, mais qui donne un livre instructif en faisant le tour des grandes figures qui ont marqué et continuent de marquer le genre. À travers leur histoire, on en apprend beaucoup sur la guerre elle-même et, au risque de sonner quétaine, un peu sur la vie.
Les cowboys de l’information doivent-ils être vus comme des êtres au courage honorable ou comme des «drogués de la guerre»? Il n’y a pas de réponse, mais quand la lecture est agréable, ça vaut le coup de se poser la question.
Promets-moi que tu reviendras vivant : Ces reporters qui vont à la guerre, Danielle Laurin, Libre Expression, 2010.
Peut-on photographier le chaos sans y prendre part?
Andrés Faulques, ancien photographe de guerre, se retire dans sa tour pour peindre une fresque circulaire sur la guerre et le chaos à travers les âges. Son passé revient le hanter lorsqu’un ancien combattant croate le visite avec l’intention de le tuer. Et de lui faire la conversation avant.
Malgré cette mise en scène surprenante, le roman est réaliste – l’écrivain espagnol a lui-même été reporter de guerre dans une ancienne vie. Plus on avance, plus la profondeur du propos est révélée, comme un gouffre de cynisme dans lequel le lecteur s’enfonce. Et pourtant, le récit est porté par un puissant souffle romanesque.
Mieux connu pour ses romans historiques, Arturo Pérez-Reverte signe ici sa propre fresque, une sombre et grande oeuvre. Un de ces rares bouquins qu’on voudrait ne jamais terminer.
Le peintre de batailles, Arturo Pérez-Reverte, Seuil, 2007.