Saviez-vous qu’il n’y a que 18 ponts sur un total de 1982 (donc moins de 1%) qui ont été nommés d’après le nom d’une femme au Québec? En Estrie, ce sont deux ponts sur 127 qui portent des noms de femmes, soit un pont à East Hereford (Joséphine-Bean) et un autre à Lac-Mégantic (Agnès).
C’est à partir de ce constat que les organismes PEPINES et ConcertAction Femmes Estrie ont allié leurs expertises et leur force de mobilisation pour proposer à la ville de Sherbrooke d’honorer une femme abénakise en donnant son nom au pont signature, qui remplacera l’actuel pont des Grandes Fourches. La démarche est simple: faire un effort supplémentaire vers une toponymie paritaire, puisqu’une infime part des toponymes sherbrookois formés d’après des noms de personnes honore la mémoire de femmes.
En raison de l’architecture proposée du futur pont, avec ses haubans en forme de tipi, ce dernier sera un symbole rappelant que Sherbrooke est situé sur le territoire ancestral de la Première Nation W8banaki (Abénaki). L’idée s’est donc imposée d’elle-même: honorer une femme abénakise. La consultation du milieu constitue un élément indispensable au traitement des toponymes autochtones, c’est pourquoi le Grand Conseil de la Nation Waban-Aki a été approché pour collaborer à cette démarche. Après avoir consulté l’exécutif du Conseil de la nation abénakise de Femmes autochtones du Québec et les élu.es du Conseil des Abénakis d’Odanak, c’est le nom de Mali Agat qui a été retenu. Il a publiquement été déposé à la séance du Conseil municipal sherbrookois du 15 avril 2019 par une représentante de PEPINES et une représentante du Grand Conseil. Plus de 500 citoyen.nes et organisations ont appuyé la démarche!
Mali Agat maîtrisait les connaissances liées à la médecine traditionnelle abénakise et était une guérisseuse connue et respectée, autant par les autochtones que par les colons français et anglais. Elle est née aux environs des années 1740 et est décédée en 1816. Elle est venue en aide à quiconque en avait besoin, peu importe leur origine. Elle incarne ainsi des valeurs bien ancrées au sein de la nation abénakise: l’ouverture, l’entraide et le partage des savoir-faire. De plus, c’est une manière de rappeler la force et la résilience des femmes abénakises, qui ont été et qui continuent d’être à l’avant-plan des luttes des femmes autochtones.
Au moment d’écrire ces lignes, ni le Conseil municipal, ni son comité de toponymie n’a donné suites à cette demande. C’est assurément un dossier à surveiller!