Nationalisme ou pluralisme … est-ce un vrai dilemme?

Date : 17 juin 2015
| Chroniqueur.es : Pacifique Bugingo
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«Soyons Maîtres chez nous», c’est ce que Jean Lesage scandait en 1962. L’expression émotionnelle du citoyen à l’endroit de sa nation est observable partout là où cette dernière est présente. Un fort sentiment d’appartenance se manifeste chez ce citoyen à l’égard de sa patrie. En effet, il est tout à fait légitime d’éprouver de la fierté quant à notre nation qui est partie intégrante de notre identité.

Pour le Québec, ce nationalisme dynamique lui est vital puisqu’il est source de progrès et de développement: il a d’ailleurs été le précurseur de la nationalisation de l’électricité en 1963. D’autant plus que, étant une société distincte à celle du reste du Canada, le Québec se doit d’être en mesure de se revendiquer pour plaider ses particularismes. Ce faisant, il pourra s’épanouir dans un pays, certes, mais également dans un monde aux sociétés disparates.

Ce qui importe est la façon dont cette dynamique s’organise. Se structure-t-elle dans une paisible harmonie ou dans une profonde exclusion? Autrement dit, s’agit-il d’un nationalisme inclusif ou exclusif?

Les paroles de Jacques Parizeau suite à la plus récente défaite de la cause souverainiste résonnent comme un écho dans notre mémoire collective, encore aujourd’hui: «C’est vrai, c’est vrai qu’on a été battus, au fond, par quoi? Par l’argent, puis des votes ethniques, essentiellement». Ces paroles avaient été exprimées devant une foule en larmes, dont plusieurs minorités ethniques qui en plus d’avaler cette défaite, devaient entendre ce discours accusateur et infondé.

Plus récemment, Pierre Karl Péladeau, nouveau chef du Parti Québécois, y est allé de cette affirmation, lors d’un échange organisé par le Conseil national des jeunes du Parti Québécois: «On n’a pas 25 ans devant nous [pour faire la souveraineté]. Avec la démographie, avec l’immigration, c’est certain qu’on perd un comté à chaque année».

De ces affirmations se dégagent à la fois de l’amertume et à la fois de la répréhension envers les minorités ethniques qui, aux dires de ces élites politiques, ne font pas partie de la nation québécoise. Du moins, elles n’ont pas la même légitimité que les Québécois de souche d’exprimer leur voie sans être stigmatisées. Ce qui est initialement légitime, la volonté de s’émanciper d’une entité contraignante, devient soudainement nuisible. À ce chapitre, Charles Taylor, philosophe canadien de haute renommée, s’est prononcé à la Télévision de Radio-Canada: «Quand on dit qu’il faut s’affirmer « québécois », mais quel Québécois? C’est un « nous » qui s’affirme aux dépens de la minorité». En ce sens, il faut se méfier de tout discours fustigeant les minorités visibles. Et plutôt se rallier aux discours tels que celui-ci: «l’immigration n’a rien à voir là-dedans. Moi, je rêve de rallier tous les Québécois sans exception et je rêve que le PQ soit représentatif de l’ensemble de la population telle qu’elle existe», réplique d’Alexandre Cloutier, ex aspirant-chef de la tutelle péquiste.

Certes, les individus qui composent la nation québécoise ne sont pas homogènes. Cette hétérogénéité sociétale peut être perçue comme une entrave à la cause nationaliste. L’unité des contraires qui s’incarne dans le pluralisme peut s’avérer comme étant un rouage essentiel au développement d’un nationalisme inclusif. L’union de ce qui diverge, en l’occurrence les citoyens québécois, peut effectivement donner lieu à une société réconciliée de ses multiples oppositions. Et c’est chez le total désaccord des individus qu’émergera la concordance. Ne dit-on pas que les opinions divergentes sont les racines de ce qui fleurit comme étant le progrès? Il en va de soi en ce qui a trait aux divergences individuelles. Ce progrès social exige une synchronisation de ceux qui le mettent en œuvre, sans quoi il risque d’être bancal, facilement ébranlable.

Simplement dit, plutôt que de chercher ce qui pourrait javelliser notre société en s’attaquant à nos différences, aussi multiples soient-elles (croyances religieuses, traditions, etc.), nous devrions composer avec celles-ci pour en faire une source d’harmonie.

Concrètement, c’est en accommodant notre société via des politiques inclusives tenant compte de nos différences que, petit à petit, nous donnerons lieu à un peuple plus uni et revendicateur; car telle est l’essence nationaliste à laquelle le Québec aspire.

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