Le 13 février dernier avait lieu une soirée de « Consultation publique » sur la « Politique municipale en matière d’immigration ». Bien peu de personnes non immigrantes y étaient présentes. Il y en avait à peine une douzaine, hormis quelques élu(e)s, fonctionnaires et nombreux membres d’organisations associées aux communautés culturelles.
L’ancienne politique appelée « Politique d’accueil et d’intégration des personnes immigrantes » datait de Jean Perrault (Hiver 2009) et était en partie basée sur le recensement de 2001, on comprend qu’elle soit totalement obsolète. Pour le moins. On pouvait y lire dans le mot du président du « comité d’élaboration de la politique d’accueil et d’intégration des personnes immigrantes » Pierre Boisvert : « Cette présente politique n’est qu’une étape et c’est à nous tous ensemble, de travailler maintenant à faire de Sherbrooke une ville plus accueillante et inclusive ».
Ça aura pris 14 ans avant d’y revenir. D’où la question dans le titre.
Je ne crois pas que cette mise à jour soit amenée par l’élection de membres de minorités au Conseil municipal en 2021. C’est peut-être même l’inverse : la population les aurait élu(e)s parce que sa vision a évoluée depuis 2009. Pour le mieux. La politique doit refléter cette évolution.
La nouvelle proposition s’appellerait : « Politique pour une ville accueillante et inclusive pour les personnes issues de l’immigration, réfugiées et sans statut ».
J’ai quelques malaises avec ce titre :
Premièrement, le titre est trop long. Je doute qu’on y réfère par la « Politique pour une ville… » et patati et patata. On dira probablement la « Politique d’immigration » pour faire court. Un titre n’est pas une table de matières : on ne doit pas essayer de tout mettre dedans.
Deuxièmement, « pour une ville accueillante et inclusive » suppose qu’elle ne l’est pas déjà, ignorant du même coup les réalisations d’individus, d’organismes et de « la Ville » depuis 50 ou 60 ans. Je me rappelle clairement qu’en 1979, déjà des bénévoles accompagnaient des personnes immigrantes au centre-ville en novembre pour les chausser et les habiller pour faire face à nos hivers.
Troisièmement, « pour les personnes issues de l’immigration, réfugiées et sans statut », ça laisse de côté plusieurs groupes. Par exemple, les chercheurs des universités qui viennent et viendront travailler ici (notamment pour la création d’une filière des sciences quantiques et qu’on voudra retenir par la suite) n’entrent pas dans ces catégories.
Serait-ce de pousser le bouchon trop loin que de proposer une « Politique du vivre ensemble » qui inclurait bien sûr les personnes immigrantes, mais aussi les autochtones et, pourquoi pas, les minorités d’ici ? Je veux dire les « personnes immigrantes de deuxième et troisième génération » (expression que je déteste puisque nous sommes presque tous des « personnes immigrantes de Xième génération »), le statut bilingue de l’arrondissement de Lennoxville, la mise en pratique de la laïcité au municipal, etc.
Bien sûr, pour être efficace et représenter un réel changement, cette nouvelle politique devra s’accompagner d’un plan d’action. À défaut de quoi, elle risque de devenir juste « une autre politique qui dort sur une tablette ». Comme la « Politique de consultation citoyenne » adoptée aussi en 2009, mais qu’on ne respecte que trop rarement. On ne l’a pas respectée encore une fois pour consulter la population sur cette nouvelle politique d’immigration. Si ça avait été le cas, avec de meilleures communications, il y aurait eu plus d’intérêt et une plus grande participation. Les élu(e)s et fonctionnaires devraient en prendre bonne note et revoir leurs pratiques.
Les nombreux organismes qui regroupent les communautés culturelles sont très actifs et impliqués dans la communauté. Pour avoir participé à trois campagnes électorales, je peux confirmer que leurs membres nous cherchent, nous trouvent et nous invitent aux événements qu’ils organisent. Ils nous accueillent et savent nous mettre à l’aise. Souvent en partageant un repas, symbole du « vivre ensemble ». Eux savent susciter l’intérêt et la participation.
Ne devrait-on pas, à l’instar des communautés culturelles, prendre les moyens pour renouveler ce « vivre ensemble » pour que les personnes qu’on accueillera se sentent les bienvenues ? J’espère que la participation citoyenne à venir fera que la nouvelle politique (et le plan d’action qui doit l’accompagner) permettra d’atteindre cet objectif commun.