Il y a des années de cela… bien avant l’époque des grandes sagas de science-fiction à la Star Wars ou la Matrice… bien avant notre époque marquée par d’énormes productions où le débordement d’effets spéciaux camoufle la cruelle absence de scénario… bien avant tout ça, il y avait Dune.
Depuis sa publication en 1965, la saga de Dune écrite par Frank Herbert est devenue l’une des séries les plus populaires et des plus complexes par ses thématiques passant de l’écologie aux guerres de religion. Une profondeur et une complexité rivalisant avec des sagas comme le Seigneur des Anneaux et rendant d’autant plus difficile son adaptation à l’écran. Pourtant, les adeptes connaissent bien la troublante mais fascinante version de David Lynch datant de 1984, devenue culte malgré son échec commercial. Puis, les adeptes eurent droit aux deux mini-séries Frank Herbert’s Dune et Children of Dune, inspirée des trois premiers romans de la saga.
Toutefois, rares sont ceux qui connaissaient la version de l’excentrique artistique Chilien Alejandro Jodorowsky, cinéaste reconnu pour ses légendaires films El Topo, La montagne sacrée, ou pour ses nombreuses BD de science-fiction, dont l’Incal, sa plus connue.
Imaginez un instant une gigantesque production mettant en vedette Salvator Dali, Orson Welles, David Carradine et Mick Jagger, sous une musique de Tangerine Dream et de Pink Floyd, et incluant les designs visuels de l’inquiétant H.R. Giger et les effets spéciaux de Dan O’Bannon (ces derniers furent des années plus tard responsables de la création d’Alien). Gigantesque est le mot pour décrire l’ambitieuse vision de Jodorowky qui, en 1974, fut mandaté pour adapter le roman culte. Vision qui fut abrégée puisqu’aucun studio de l’époque n’a voulu de son projet.
Le documentaire de 2013 Jodorowsky’s Dune, réalisé par Frank Pavich, retrace les origines de ce projet qui, selon certains, est «le plus grand film de science-fiction, jamais réalisé.» Une production qui fut condamnée à ne jamais voir le jour en raison de la vision démesurée du réalisateur. Le documentaire couvre ainsi cet unique moment où de grands artistes se sont côtoyés pour donner vie à la célèbre saga. Malgré l’amertume de Jodorowsky, celui-ci souligne avec malice l’influence énorme que son travail a eue sur la science-fiction des années qui suivirent. Sans lui, Alien n’aurait probablement jamais vu le jour. Star Wars et Le cinquième élément auraient été bien différents.
Jodorowsky’s Dune nous parle d’une création qui a marqué la science-fiction des 40 dernières années. On y découvre les limites imposées à un créateur de talent. Génie artistique pour les uns, fou excentrique pour d’autres, Jodorowsky demeure l’un des artistes les plus importants du 20e siècle qui a la capacité de faire changer notre perception du monde.