«Une société sans drogue, ça n’existe pas!». C’est ainsi que débute le petit ouvrage collectif «Drogues: savoir plus, risquer moins» qui a été édité pour la 1re fois en 2000 en France et en est à sa 7e édition au Québec. Ce livre s’organise en fiches thématiques et couvre l’ensemble du spectre des drogues, c’est-à-dire qu’il parle de tous les produits psychotropes illégaux, mais ne fait aucunement l’impasse sur les produits en vente libre ou régulée que sont l’alcool, le tabac mais aussi (surtout?) les médicaments.
J’ai découvert ce livre à l’âge qu’il faut, c’est-à-dire à mes 20ans, lorsque j’étais étudiant et prenais l’indépendance de mes parents. C’est le moment de la vie où les expériences sont souvent les plus fortes et les plus variées. Qu’une fois le giron et les habitudes familiales quittées, on se retrouve confronté avec délectation et parfois enivrement au tourbillon de la vie. Alors, on fait quoi quand on nous propose du speed, du pot ou un verre de trop? On essaie parce qu’on est curieux? On refuse parce qu’on a trop peur? On consomme sans penser que ça puisse être délétère? «Drogues: savoir plus, risquer mois» répond à toutes ces questions en présentant objectivement, et surtout sans jugement moral ou moralisateur, la nature et la spécificité de toutes les drogues. Chaque page présente un psychotrope (une drogue) en détaillant les effets recherchés, ce que le produit fait sur le corps et le cerveau, les effets secondaires, la question de l’accoutumance, et les contextes sociaux de la prise du produit. Il a été le document parfait pour me faire un premier avis, calmement chez moi ou dans des discussions informelles avec des amis, sur les produits que j’aurais le goût d’expérimenter, peut-être, et ceux qui d’un autre côté me semblaient trop durs vis-à-vis du trip qu’ils offraient, ou des conséquences auxquelles il faudrait peut-être faire face.
«Une société sans drogue, ça n’existe pas!». Et il faut souligner le courage et l’honnêteté intellectuelle des services de santé du gouvernement d’avoir assumé d’écrire une telle phrase dans un livre à destinée du grand public et surtout de sa jeunesse. Car une fois que l’on a accepté cette vérité, on passe à l’étape suivante qui est d’informer et d’éduquer une population à faire ses choix en toute connaissance de cause. Et que toutes celles et tous ceux qui doutent de cette affirmation s’interrogent sur le niveau de consommation de médicaments psychoactifs sur prescription. Au Québec, c’est 6% des personnes de 0 à 25 ans inscrites à la RAMQ qui ont été diagnostiquées ou ont reçu une prescription pour un TDA/H. Combien de personnes parmi nous se sont fait prescrire des antidépresseurs? Une telle «épidémie» laisse songeur quant à ses causes sociales plutôt que physiologiques.
Et c’est peut-être ce que l’on peut regretter actuellement de la prochaine légalisation du cannabis au Canada: l’absence de débat et de discussion autour de la nature même du produit. Cette promesse de campagne tenue de Justin Trudeau fait surtout parler d’elle du point de vue économique. Nous entendons régulièrement des annonces de gros joueurs du milieu se mettre en pole position du marché, qui de construire des entrepôts de culture hors sol, qui de celui qui aura le monopole de la vente, qui de la répression des jardiniers amateurs. La prochaine légalisation du cannabis doit être le moment privilégié pour nous interroger en tant que société sur l’utilisation de produits psychotropes et comment l’arrivée du cannabis en vente libre va modifier, ou non, nos comportements. Comment nous communiquons avec nos enfants, nos proches, sur cette consommation. En cela, nous saluons le travail d’Elixir pour son travail terrain en Estrie sur l’éducation et la sensibilisation aux consommations de psychotropes et autres «drogues».
En vous souhaitant une saison estivale pleine de délices et de trips à la hauteur de vos envies.