Crise alimentaire mondiale (bis)

Date : 8 avril 2012
| Chroniqueur.es : Omen-Daza Razafimandimby

La crise alimentaire était relativement sortie des écrans radars depuis que la crise économique a pris le relais dans les bulletins d’information. Elle revient en force en 2011.

En effet, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a tiré dernièrement la sonnette d’alarme sur la flambée menaçante des prix des denrées alimentaires. Ces prix n’ont cessé d’augmenter depuis les six derniers mois, jusqu’à atteindre aujourd’hui un nouveau record. Le coût des céréales qui sont la base de l’alimentation mondiale est passé de 150 à 237,67 points pour l’année 2010.

Avec cette instabilité et cette hausse généralisée des coûts, une nouvelle crise alimentaire est à prévoir. La crise de 2008 s’était manifestée de la même façon : par une augmentation des prix et une diminution des réserves entraînant une pénurie. La seule différence est qu’en 2008, c’est l’Afrique qui a payé le plus cher. Espérons que cette période difficile ne se reproduira pas, sinon cette fois-ci, c’est le monde entier qui sera touché.

Les causes

Les intempéries climatiques sont historiquement la cause principale des crises alimentaires. Aujourd’hui, elles sont multiples et plus complexes.

Le facteur le plus souvent cité est lié à la démographie. La population est en constante croissance alors que la production agricole destinée à l’alimentation est en décroissance. L’augmentation du pouvoir d’achat de la classe moyenne émergente dans les régions à forte concentration humaine (comme la Chine ou l’Inde) est aussi parmi les motifs de cette hausse de la demande. Et, évidemment, les ressources sont loin d’augmenter proportionnellement. La FAO remarque plutôt l’effet inverse, en notant une baisse de la production céréalière de 10% au cours des dernières années.

De plus, la constante hausse de la demande mondiale en énergie (biocarburants ou autres combustibles) est cruciale dans la hausse généralisée du prix de certaines denrées. Selon l’OCDE, la production d’agrocarburants pourrait bien être le principal facteur d’une potentielle hausse de 20 à 50% du prix agricole d’ici 2016.

On ne peut non plus omettre de mentionner les conséquences des catastrophes naturelles sur le marché mondial des denrées alimentaires. La sécheresse inédite qu’a connue la Russie l’année passée a contraint cette dernière à suspendre pour un temps ses exploitations de céréales. Les graves inondation qui ont coûté 14 milliards de dollars à l’Australie, au mois de décembre, obligent ce grand exportateur mondial à réduire de 27% ses exportations de sucre vers l’Asie. Le typhon aux Philippines, en octobre 2010, a endommagé plusieurs milliers de tonnes de riz. À ces facteurs qui causent la baisse de la production et la hausse des prix, s’ajoutent d’autres problèmes comme l’érosion du sol.

Mis à part ces phénomènes, nombreuses sont également les terres à vocation agricole qui sont transformées en champs industriels ou tout simplement en autoroutes pour les nécessités de l’urbanisation. Un rapport du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) soulignait récemment la nécessité d’inverser cette tendance jusqu’en 2030, en exploitant plus de surfaces, précisément 120 millions d’hectares, ce qui correspond à la taille de la France et au tiers de l’Inde.

Des actions

L’ONU entend également réagir. Plusieurs initiatives d’assistance alimentaire sont entreprises à travers ses institutions spécialisées, ses programmes, ses fonds et ses commissions. Le Secrétaire général, Ban Ki-moon, par exemple, a récemment appelé les pays donateurs à soutenir le Programme alimentaire mondial (PAM) et le FAO, qui auraient respectivement besoin de 755 millions de dollars pour l’achat de vivres et de 1,7 milliard de dollars pour le renforcement de la production agricole dans les pays dans le besoin.

Malgré cela, une des manières efficaces de résoudre ce problème serait de ne pas oublier que chaque pays est un cas particulier avec ses tenants et aboutissants, ce qui n’écarte pas l’importance d’instaurer une gouvernance globale, une meilleure coopération autour de l’autosuffisance alimentaire.

Le déséquilibre, sur le marché international, entre l’offre et la demande mondiales de denrées alimentaires est un fait. Pour éviter une crise, ce qui conviendrait, c’est donc d’améliorer les conditions d’exploitation pour que la production connaisse une hausse. De même, il faut réajuster la consommation pour que celle-ci soit proportionnelle à la production agricole, mais surtout pour qu’elle soit suffisante pour la consommation et la réserve. Il faut également aider les paysans producteurs dans leurs tâches : meilleure taxation, octroi d’engrais, produits phytosanitaires, infrastructures convenables, système de crédit et d’assurance, communications, électricité, etc.

Quant aux pays en développement, il faut les initier aux techniques plus écologiques : meilleur système d’irrigation, produits insecticides, fertilisants, etc. Ensuite, il est primordial de mieux organiser la distribution de la production aussi bien sur le plan national qu’international. Et bien sûr, pour revenir à nos assiettes, il nous faut éviter les gâchis et les pertes de consommation.

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