La prise de conscience de l’enjeu du changement climatique dans la société a entrainé l’apparition de noms nouveaux dans l’espace public comme le GIEC et la COP.
Alors que le GIEC, le Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat, a en charge de regrouper l’ensemble des données scientifiques publiées sur la question du climat et d’émettre une analyse scientifique sur les conséquences de ces observations, la COP a en charge de prendre des décisions politiques vis-à-vis des changements climatiques avérés et anticipés. Le terme COP, pour COnférence des Parties, désigne un rassemblement des États membres de l’ONU (les parties) pour un sujet donné. Par abus de langage, la COP désigne le rassemblement des pays membres de la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC). Ils sont à ce jour 190 pays à y participer, en incluant les États-Unis dont le processus de retrait de l’Accord de Paris est en cours.
La COP23 s’est tenue à Bonn en Allemagne en novembre 2017 et a regroupé environ 30000 participants et participantes : les négociateurs et négociatrices officiels des états, les différentes organisions représentant la société civile et les entreprises privées.
Place aux jeunes
Parmi toutes les personnes présentes, Céline Bouffard, étudiante à la maitrise en politique appliquée à l’Université de Sherbrooke, effectuait un mandat pour l’association québécoise ENvironnement JEUnesse, un organisme qui vise à conscientiser les jeunes du Québec aux enjeux environnementaux. « J’ai effectué des travaux de recherche pour cette association lors de la COP22 à Marrakech. Catherine Gauthier, la directrice d’ENvironnement JEUnesse, m’a ensuite proposé d’être la responsable de la délégation d’ENvironnement JEUnesse pour la COP23.
Il faut savoir que ENvironnement JEUnesse est l’organisation qui a poussé le plus pour que les jeunes aient une place institutionnelle dans les négociations internationale. Ceci s’est concrétisé par la formation de la coalition YOUNGO qui a un droit de parole dans les négociations, et ce grâce aux pressions qu’ont exercées Environnement Jeunesse et d’autres associations jeunesses dans le monde ».
Marathon de négociations
Une COP se déroule sur deux semaines et prend la forme d’un vrai marathon pour les participants et les participantes qui doivent négocier ou faire avancer leurs revendications sur tous les points à l’ordre du jour. « C’est l’Accord de Paris qui définit l’ordre du jour. Les négociations de la COP sont là pour mettre en œuvre cet accord, pour remplir les alinéas qui vont décrire comment chaque objectif que s’est fixé l’Accord de Paris doit être concrètement organisé. Et ces négociations vont durer à chaque COP jusqu’à celle de 2020 où l’Accord de Paris devra être mis en œuvre. À la fin de la COP, il faut arriver à une négociation finale du point à l’ordre du jour ».
Il s’agit d’un travail de fourmi qui couvre de nombreuses thématiques. Pendant sa présence à Bonn, Céline s’est concentrée sur la question de « la plateforme sur les communautés locales et autochtones » et sur la trame de négociation « Pertes et Préjudices », en lien avec ses précédents travaux de recherche pour la COP22.
« Pour que l’Accord de Paris se mette en place sur le terrain, il faut impliquer les communautés locales et autochtones. C’est ce que vise la plateforme sur les communautés locales et autochtones en favorisant les savoirs locaux et ancestraux. C’est également un moyen de donner une voix aux personnes qui ne sont pas représentées par un État. La COP mise beaucoup sur les communautés locales pour permettre le changement. »
La trame des « Pertes et Préjudices » est un des points discutés pour la mise en place du « fond d’adaptation » qui vise à financer les conséquences du changement climatique. « Ici, on cherche à donner une valeur monétaire à la perte d’un bien matériel ou immatériel, sans que ça soit une aide humanitaire à la suite d’une catastrophe. Ça vaut quoi une vie humaine? Ça vaut quoi un village, une culture, une tradition qui disparait? Ce sont des négociations très difficiles, car personne ne s’entend sur la valeur financière de telles choses, et qui doit payer. »
Accomplir ce travail de défrichage et de déminage est pourtant essentiel pour aboutir à un accord à la fois efficace mais également accepté par tous les pays présents. « J’ai quitté les deux COP auxquelles j’ai participé avec un grand sentiment d’humilité. Les négociateurs, ce sont des humains. C’est extrêmement complexe, ils sont pris de partout. Si j’ai appris quelque chose avec les négos, c’est que c’est beaucoup plus grand, plus vaste qu’une seule personne. J’ai un immense respect pour les gens qui négocient. Ça n’est pas parce qu’ils ne veulent pas, qu’ils ne sont pas conscient, c’est parce que c’est trop complexe. Lors d’une ronde de négociation, pendant des heures, on peut discuter de deux mots. Au final, on sort de là en pensant qu’il ne s’est rien dit, mais à l’échelle mondiale… c’est énorme! On a discuté de deux mots, mais c’est une avancée de s’entendre là-dessus »
Tisser l’humanité
C’est peut-être également ça l’enjeu de la COP : faire se rencontrer et discuter la planète entière d’une problématique qui concerne toute l’humanité, mais avec des réalités, des conséquences, des besoins et des responsabilités diverses. « La crise climatique, c’est peut-être aussi la crise du lien social. Si on se sentait concerné, on arriverait à s’entendre. J’ai rencontré des représentants des délégations des petits États insulaires. Étant moi-même originaire des îles de la Madeleine, je me rendais compte qu’on se comprenait sur plein de choses, alors qu’il est évident que ma réalité est toute autre que la leur. Eux me disaient « chez nous, les gens meurent, donc je veux qu’il se passe quelque chose ». Le fait de rencontrer ces gens, la rencontre physique, ça crée du lien. Cette rencontre physique des autres réalités du monde face aux changements climatiques, c’est essentiel, et la COP permet ça ».
L’Accord de Paris prévoit une limitation de 2°C de la température moyenne du globe, mais les projections actuelles nous mettent sur la trajectoire d’un réchauffement global de 3°C. Collectivement, dans nos vies, nos villes, nos provinces, nos États, nous devons trouver les ressources et les moyens d’atteindre cet objectif porteur de sens pour toute l’humanité.