Martine à l’école
Gilbert Delahaye, 1957
llustrée joliment d’un style réaliste naïf aux couleurs pastel, cette série à succès nous présente Martine, une gamine de 10 ans joyeuse et curieuse. Dans ce 6e tome, elle vit une journée d’école comme tous les enfants en rêvent. Imaginez ! Son amie Clara a apporté une souris blanche gagnée à la foire et une nouvelle élève venue d’Inde se joint à la classe : déjà ça frappe fort. Il y a ensuite séjour de la classe à la biblio, récré avec match de foot, rédaction d’un poème à 10 mains, cours de basket, dîner à la cantine avec repas santé préparé sur place pour tout le monde, exposition de peinture puis re-récré où des têtards sont pêchés puis rapportés dans l’aquarium de la classe. Wow ! À la fin des cours à 16h30, on voit une Martine tout sourire à vélo, saluant Naina, cette nouvelle élève devenue nouvelle amie.
Bien des reproches ont été formulés sur la série Martine, « œuvre rétrograde et sexiste aux préoccupations bourgeoises », avec raison. N’empêche, ce Martine à l’école a de quoi inspirer.
UNE SOCIÉTÉ SANS ÉCOLE,
IVAN ILLICH, 1971
Penseur de l’écologie politique, Ivan Illich (1926-2002) considère que l’institutionnalisation d’un moyen par la société tend à croitre jusqu’à dépasser un seuil où il devient dysfonctionnel et nuit au but qu’il est censé servir. Ainsi, selon son analyse, l’automobile nuit au transport (il est provélo avant l’heure), la médecine nuit à la santé et, idée développée dans cet essai, l’école nuit à l’éducation. Ses expériences le mènent à penser que les capacités naturelles d’apprentissage de l’enfant se manifestent en dehors de l’école, que ce n’est pas l’école qui apprend à l’enfant à parler, à jouer, à aimer, à sociabiliser, à apprendre une deuxième langue, le gout de la lecture, etc. Il prône ainsi une déscolarisation de la société industrielle, car selon lui, « prisonnier de l’idéologie scolaire, l’être humain renonce à la responsabilité de sa propre croissance et par cette abdication, l’école le conduit à une sorte de suicide intellectuel ». En substitution, il préconise de créer des « réseaux de communication culturelle » avec une possibilité d’enseignement mutuel, entre pairs, à égalité. À lire pour ébranler nos certitudes.
Libre d’apprendre
Gabriel Nadeau-Dubois (dir.), 2014
Avec un épilogue de nul autre que Noam Chomsky, ainsi qu’une contribution de notre Normand Baillargeon national, cet ouvrage collectif n’a rien à envier aux grandes revues sociologiques de ce monde. Né des cendres encore tièdes de la grève étudiante de 2012, cet ouvrage se veut un plaidoyer solidement appuyé en faveur de la gratuité scolaire. Plusieurs collaborateurs de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS), dont Philippe Hurteau, Julia Posca et Simon Tremblay-Pepin défendent le réalisme économique d’un tel projet de société. En amont, ce sont les Micheline Lanctôt et Lise Payette de ce monde qui supportent l’idée d’une éducation gratuite permettant aux femmes de se tailler une place en société, de même que le Widia Larivière et Mélissa Mollen-Dupuis qui plaident pour la décolonisation de l’éducation.
Bien que la grève étudiante de 2012 ait soufflé ses dix bougies, l’idéal de la gratuité scolaire demeure tout aussi pertinent, surtout en ces temps où l’inflation s’emballe et où les politicien·ne·s de ce monde passent en mode séduction.