L’arabe du futur — 4
Riad Sattouf, Allary Éditions
C’est peu dire que ce 4e tome de la série était attendu. Riad Sattouf, né d’une mère française et d’un père syrien, nous raconte son enfance partagée entre la Lybie de Mouammar Khadafi, la Syrie de Hafez al-Assad, et la Bretagne du crachin et des embruns. À la fin du dernier épisode (deux ans déjà), son père partait victorieusement pour être professeur d’université en Arabie Saoudite. Dans ce 4e épisode, Riad entre en adolescence pendant que son père entre en religion et sa mère en rébellion. La vision du petit Riad s’aiguise sur la réalité de la vie au Proche-Orient, l’évolution de la relation entre son père et sa mère, ainsi que sur la découverte des femmes et du désir. Chaque page est pleine d’humour et d’une force explosive, contraste saisissant entre les tourments de l’adolescence et une vie de famille qui bascule (sortie prévue le 5 novembre, les 3 premiers tomes sont disponibles à la bibliothèque Éva-Senécal).
14–18
Corbeyran et Le Roux, éditions Delcourt
Cette série raconte la vie de huit hommes quelconques, vivant dans un même village de France, et entrainés dans l’immense désastre de la Première Guerre mondiale. Chacun laisse derrière lui une femme et sa vie d’avant, chacun a son caractère et sa relation à «la défense de la Patrie», chacun devra vivre son sort où la folie des dirigeants et de l’état-major l’a plongé. Cette série est brillamment construite pour souligner le 100e anniversaire de cette guerre: chaque tome évoque un épisode spécifique de la guerre (la mobilisation générale en août 1914; la première attaque au gaz en avril 1915; l’armistice en novembre 1918) et sa date de publication correspond à la date du centenaire de la période relatée. Une histoire simple, une histoire vraie, une histoire qu’il faut continuer de raconter pour donner de la matière aux hommes dont on a gaspillé la jeunesse et la vie sans raison bien précise, presque par ennui (sortie cette semaine du 10e et dernier tome «La Lune en héritage (Novembre 1918)». Les autres tomes de la série sont disponibles à la bibliothèque Éva-Senécal).
Kobane Calling
Zerocalcare, éditions Cambourakis
Est-ce qu’un punk romain (habitant de Rome en 2018, pas dans l’Antiquité) né dans les années 1980 ça peut s’intéresser à la géopolitique du Kurdistan? Ben oui, sans lui-même trop savoir pourquoi le nom de Kobane, ville de Syrie à dominante Kurde et reconquise par l’armée Kurde sur Daech, sonne dans sa tête comme the place to be. Kobane Calling est une bande dessinée résolument punk, dans sa façon d’aborder le conflit que l’on entend raisonner au loin du Téléjournal. Qu’est-ce que le Kurdistan? Un peuple sans pays mais qui habite un territoire fragmenté entre la Syrie, la Turquie, l’Irak et l’Iran et qui s’est donné comme article premier de sa constitution l’égalité entre les femmes et les hommes. Car si Zerocalcare se fait arrêter par la police turque, traverse en bus l’Irak, dors dans des villes à moins de 10 km de Daech, c’est pour percer ce mystère d’un peuple où les femmes portent les armes et où l’objectif politique est de créer un État progressiste basé sur l’éducation et la prise en charge par la collectivité de la santé et de la vieillesse de sa population. Tu le savais ça toi? Moi, non!