Au Québec, depuis 2014, au moins 450 résidences privées pour aînés ont fermé leurs portes, par manque de ressources pour maintenir leurs services. Et on ne parle pas des grandes bannières, Résidences Soleil et compagnie. Nous parlons ici surtout de petites à moyennes résidences, principalement en milieu rural, qui sont parfois le seul lieu d’hébergement possible pour les personnes aînées lorsqu’elles ne peuvent plus rester chez elles.
Lorsqu’une résidence ferme, cela équivaut au déracinement de dizaines de personnes de leur communauté. En Estrie, nous avons assisté depuis deux ans à trois fermetures au moins: Sawyerville, Asbestos, la 13e Nord… Et 50 autres fermetures sont à prévoir en Estrie seulement selon le Regroupement québécois des résidences pour aînés (RQRA).
Dans plusieurs cas, les propriétaires ne donnent pas beaucoup de marge de manœuvre aux résidents qui doivent être relocalisés: certaines résidences ont fermé à une semaine d’avis seulement, sans dédommager aucunement les personnes touchées. Je vais vous raconter une histoire qui nous est parvenue à l’AQDR Sherbrooke et qui nous a menés à créer une pétition pour le respect des droits des personnes aînées en résidence privée.
Mme Bélanger (nom fictif) habite une résidence privée dans l’Est de Sherbrooke depuis huit années. Un beau jour d’été 2018, les propriétaires annoncent qu’ils doivent fermer faute de ressources suffisantes. Les locataires résidents ont une semaine pour déménager. Leur chèque pour le mois en cours a déjà été encaissé par les propriétaires. Mme Bélanger est relocalisée quelques jours plus tard dans une résidence en dehors de Sherbrooke. Elle doit payer à nouveau un loyer pour le mois en cours. À cela s’ajoutent les frais de déménagement, l’achat de meubles, les frais de rebranchement du téléphone, les demandes de transfert de dossiers pour les services sociaux et de santé vu son handicap, et surtout, surtout, plusieurs semaines d’angoisse, de stress et même d’atteinte à la dignité.
Sa fille, qui l’accompagne dans tout ce processus, tente au nom de sa mère d’envoyer une mise en demeure aux propriétaires. Sa lettre recommandée lui est retournée. Elle fait donc appel à la Régie du logement, l’instance étant censée protéger les locataires. Celle-ci ne peut l’aider, car les propriétaires ne peuvent être retracés. Dans ce contexte, la fille de Mme Bélanger a entrepris de faire changer les choses pour que ces situations n’arrivent plus. Elle a initié une pétition papier qui a récolté près de 1 500 signatures principalement en Estrie. Maintenant, avec l’aide de l’AQDR, elle tente de récolter au moins le double avec la pétition en ligne sur le site de l’Assemblée nationale.
Les demandes au gouvernement sont très claires: le délai d’avis de six mois doit être respecté lorsqu’une résidence cesse volontairement ses activités; les frais de loyer et de déménagement doivent être remboursés comme prévu par la loi; une réforme de la Régie du logement doit être faite pour qu’elle représente adéquatement les personnes aînées; enfin, le gouvernement doit soutenir financièrement les petites résidences pour qu’elles maintiennent leurs services et il doit trouver des solutions à la pénurie de main-d’œuvre.
Un peu moins d’un an après le déménagement forcé de Mme Bélanger, son état de santé physique et cognitif s’est détérioré. Sa fille souhaite que le sort des aînés partout au Québec s’améliore et que le gouvernement entreprenne de réelles actions pour assurer la dignité des personnes les plus vulnérables.
Nous espérons que ce souhait fasse écho au vôtre et que vous nous aidiez à faire pression sur le gouvernement en signant et en partageant la pétition sur le site de l’Assemblée nationale.