Le 16 février dernier marque un tournant important dans l’histoire du mouvement étudiant au Québec. Pour la première fois, des associations et groupes d’étudiant.es, de programmes et de niveaux d’études différents, ont joint leurs efforts pour organiser une manifestation commune afin de réclamer la rémunération de tous les stages.
Nous étions près de 30 000 étudiant.es en grève ce jour-là, membres de onze associations situées dans cinq régions différentes, et quelque 300 étudiant.es réuni.es à Québec pour manifester en marge du Rendez-vous national sur la main-d’œuvre. Certain.es stagiaires ont même fait la grève, en réponse à l’appel de leur assemblée générale.
Pourquoi unir et élargir les luttes pour la rémunération des stages?
Jusqu’à ce jour, ces luttes ont toujours été menées par programme et pour certains stages précis. Dans la plupart des cas, en éducation notamment, elle est restée au niveau des revendications et a eu peine à prendre son envol, ce qui l’a contrainte à devoir repartir à zéro en termes de mobilisation, sur une base cyclique. Puis il y a eu la grève des stages et internats en psychologie qui, profitant d’une conjoncture particulière, a réussi à obtenir la mise en place d’une bourse au bout de trois mois de débrayage. Cette victoire, bien que nuancée puisqu’il reste encore 750 heures de stages impayées, pave la voie pour les autres programmes dans lesquels on exige que soient complétées des centaines d’heures de stage gratuitement, notamment dans les disciplines où les femmes sont surreprésentées parmi les stagiaires. La mise en commun des différentes luttes et leur élargissement à tous les programmes sont des nécessités pour constituer un mouvement efficace, susceptible d’exercer une pression suffisante pour régler le problème pour de bon.
Pourquoi maintenant?
En plus de joindre les efforts des associations étudiantes des programmes avec stages non rémunérés et des groupes et syndicats mobilisés sur la question, il importe de passer en vitesse supérieure. À l’issue du Rendez-vous national sur la main-d’œuvre, le gouvernement du Québec a annoncé qu’il procéderait à une révision des normes du travail «le plus rapidement possible», la première en 15 ans. Or, c’est justement une clause de ce texte de loi qui permet aux employeurs de ne pas payer les stagiaires au salaire minimum! Il importe de poser dès maintenant les bases organisationnelles de la lutte en prévision de l’automne, car celle-ci risque de s’avérer musclée! Depuis dix ans, avec la crise économique, le nombre de stagiaires impayé.es tend à augmenter pour combler les coupures en main-d’œuvre dans le privé, le public et les OBNL. Au Canada, on parlerait d’environ 200 000 stages non rémunérés complétés chaque année dans le cadre d’une formation académique, et plus de 300 000 après études! D’ailleurs, la situation est semblable un peu partout dans le monde.
Qui peut s’impliquer?
Pour que cette coalition soit inclusive, elle se doit d’être souple et de servir davantage à coordonner les efforts des différents groupes qu’à les représenter. Les exécutifs d’associations étudiantes qui comptent des membres inscrit.es dans des programmes avec stages non rémunérés, mais aussi les comités femmes, les comités de mobilisation, les comités de parents étudiants, les syndicats d’étudiant.es employé.es, les groupes d’affinités mobilisés sur la question ou simplement les individus qui désirent s’organiser dans cette lutte sont invité.es à s’y joindre; notre ambition exige la mise en commun de tous les efforts. L’Association Étudiant du Cégep de Sherbrooke a déjà adopté un mandat en faveur de la mise en place d’une telle coalition. En juin dernier, une coalition montréalaise sur la rémunération des stages comptant une douzaine de groupes et d’associations a été fondée. Nous vous encourageons à faire de même dans vos associations étudiantes et vos milieux militants!
Pourquoi une coalition régionale?
Pour assurer que les différents groupes puissent prendre en charge la coalition sans que celle-ci ne se détache de leurs efforts et en vienne à les invisibiliser, il semble préférable de privilégier la coordination entre groupes sur une base régionale. Cela offre davantage de flexibilité structurelle selon les associations et comités en présence dans chaque région, et empêche qu’un groupe de Montréal s’érige en «national», comme ce fut très souvent le cas au cours des dernières décennies dans le mouvement étudiant. Ainsi, nous encourageons la mise sur pied de coalitions, semblables ou différentes, dans toutes les régions ainsi que l’entraide et l’échange d’informations et de ressources entre elles. La diversité des structures et le contrôle réel et concret de la lutte par une base mobilisée permettent une plus grande efficacité du mouvement et un meilleur ancrage sur les campus et dans les communautés.
En mettant nos efforts en commun, faisons en sorte que l’année prochaine soit celle où nous gagnerons la rémunération de tous les stages! Alors, vous embarquez?
L’assemblée de fondation de la coalition aura lieu le samedi 4 novembre, au cégep de Sherbrooke veuillez signaler votre intérêt à des fins de coordination.