Effluves de la Magog

Date : 1 mai 2024
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Août 1955. Hôpital La Providence, la petite, l’ancienne, sur la rue Principale à Magog. Drette en face de la rivière Magog tout près d’où elle prend sa source du Memphré.
C’est là où je suis né.
Un long parcours depuis, à suivre le courant.

Trajet rapido. Rue Élie à 2 pas, Venise chalet enfance été, etl’auberge des Pins, là où le lac redevient rivière. Pis switch en ado sur la rue Vanier, tsé celle en bas de la rue Vimy qui descend à la rivière. Le parc Jacques-Cartier pas loin.

Et puis, enfin !, mon premier appart’ au bout de la rue Esplanade, là où naîtra la Coop des Enfants terribles.

Et ces effluves ? J’y viens, j’y viens…

Je me suis exilé ensuite. Sur les battures du fleuve, et après, au Lac, au nord chez les Bleuets. D’autres eaux, d’autres courants, d’autres odeurs.

2014, je retrouve Sherbrooke, dans le Vieux-Nord en bordure du Centro. Un piéton, un cycliste parfois. Le pont Gilbert-Hyatt que je traverse quotidiennement.

Il m’arrive parfois, pas si souvent, une «poffe» de la Magog. Senteur unique, reconnaissable entre mille. Du coup, c’est chez nous. Cette eau qui me ramène à ma terre. Natale. Un bref instant. Une souvenance, évoquée par d’invisibles particules.

Des souvenirs surgissent alors, à l’occasion. De ces bouts de tiroirs que j’ouvre d’un coin de mémoire.

J’ai 5 ans, je fais du ski nautique sur le petit lac Magog, fièrement sur les épaules de p’pa.

On a trouvé une grosse tortue. Attention, dit m’man, ça mord ça pis ça fait mal. On croit dur comme fer que la voisine du chalet est une sorcière.

J’ai 10 ans, on part en bécique jusqu’au barrage pas loin de Venise. On pêche la carpe au grappin. Même qu’innocemment, on a failli mettre le feu en niaisant avec les broussailles.

J’ai 12 ans, je dévale la côte Vanier «à planche» sur mon Charger 3 vitesses à poignées mustang et siège-banane.
J’ai 14 ans, tous dehors devant la tivi noir et blanc, Neil Armstrong pose les pieds sur la lune.

J’ai 20 ans, les deux pieds dans l’eau pour la première fois de l’année en avril à me geler les chevilles dans la rivière (la tête, elle devait l’être un peu itou …!) Au show de la Saint-Jean au parc avec Louise Forestier et l’Infonie, une aurore boréale avec des verts et des violets. Wow, l’éclairagiste était bon en ta…

J’ai 62 ans, je me fais un feu sous le pont. Tout seul, mon tambour et moi. Pour la Saint-Jean. J’ai même crié. Mais personne ne m’a entendu.

Tout ça à cause d’une effluve. Le temps d’un si bref instant. Un éclair de présent qui me propulse sur d’où je viens.

Un jour, je serai vieux. Et j’espère alors expirer cet air en dernier souffle au confluent de la Magog où elle continue sa route vers le monde. La Magog. Ma Magog.

«L’eau qui coule dans mes veines est l’eau de la vie. Qui coule aussi dans les tiennes et qui m’amène dans ton lit. »
Librement inspiré d’une chanson de Gilles Legault du groupe Connivence. 1977.

Et vous ? Vos effluves ?

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